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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Le Nom perdu de l’Homme

Le Nom perdu de l’Homme

LA QUESTION DES QUESTIONS

est d'ordre technique

QUAND LES "CONTES" REGLENT LEURS COMPTES

AVEC LES APORIES DE NOTRE TEMPS

Sous les auspices charmeurs et les précautions rhétoriques de cet ouvrage publié aux Editions Les impliqués, se cache en réalité un manuel de combat. Et la croisade dans laquelle nous enjoint Pierre Personne, l'auteur de ce recueil de contes poétiques, n'est pas des moindres.

Il s'agit tout d'abord de désigner l'ennemi : le dragon technomorphique. Puis de livrer combat contre cet ennemi, aussi subliminal soit-il. Pour ce faire, les contes incisifs que composent cet ouvrage sont écrits dans une langue claire et vengeresse. Des charmes et des armes brillent à chaque page.

Certes, Pierre Personne n'est pas le premier de nos écrivains technocritiques. Comme prédécesseur, nous comptons notamment Martin Heidegger, le philosophe allemand qui, une vie durant, s'interroge sur le sens des choses pour en venir à la "question des questions", celle de technique. Plus la technique progresse et plus l'humanité recule ; telle est, selon Heidegger, l'axiologie du mal inscrit dans le critérium même de la technique. Quel meilleur renouvellement de la "Frage" heidegerienne qu'un bouquet de contes poétiques ? Peu usité de nos jours, le conte merveilleux est en effet un genre narratif qui contient les épiphanies qui parlent à notre âme individuelle et collective. Il garde dans sa trame analogique l'essence des choses telles qu'elles sont et non pas telle que nous voudrions qu'elles soient. La figure mythique de Midas ou celle de Prométhée condamné à être accroché à un rocher, nous rappellent que c'est la technique qui impose son critérium de fonctionnement à l'Homme et non le contraire. Afin de mieux lui dévorer son âme et son nom.

Face au dragon technomorphe, l'auteur du Nom perdu de l'Homme tire ses flèches les plus mortelles, celle qu'il a taillées dans le bois de la technocritique. Il fustige notamment "le mirage de la "High Tech", condamne le "parasitisme techno-administratif" et annonce même l'avènement d'une espèce nouvelle, l'"Homo numericus". Conscient qu'il n'y a plus un seul aspect de l'activité humaine qui ne soit impacté, de près ou de loin par la technique ou ses avatars, par la planification administrative, par le pouvoir transparent du nombre, l'auteur renouvelle d'une manière dont il a le secret, la question des questions.

Loin de s'enfermer dans le ressentiment - attitude qui scellerait alors la défaite de l'auteur et la victoire de la technique - Pierre Personne fait briller sa prose de belles trouvailles rhétoriques. Entre les pages de ses contes, l'humour y respire parfois, la poésie s'y invite souvent. On notera aussi de belles trouvailles telles que les termes "e-monde" ou le néologisme "s'ordiphoniser".

C'est à la manière masquée du héros de cape et d'épée que l'auteur démasque le mythe du progrès. Mais qui se cache derrière les masques ? Nul ne les sait. Pierre Personne l'auteur, et Gabriel Charmes, le préfacier, sont-ils une seule et même personne ? Un seul Diogène désabusé des Temps Modernes ? Nous n'en saurons pas plus sur son identité. Faisons donc contre mauvaise fortune bon cœur, et ouvrons une page au hasard de son ouvrage : « Le Nom perdu de l'Homme » :

"Un grand vent de roses se leva. Tous les horticulteurs du royaume se mirent à jardiner avec les outils des généticiens pour produire des fleurs transgéniques. Dans leurs roseraies de laboratoire, les chercheurs en technologie florale redoublèrent d'effort pour introduire le gène de la couleur bleue dans les roses. Cette saison-là, il y eut des roses plein les balcons et plein les flacons dans les grandes surfaces : roses De pluie ou roses Layette, Ophélia ou Cuisse de nymphe émue, roses Chérubin ou Nuages d'été. D'ardentes, de suaves ou d'impénétrables fragrances se répandirent dans les avenues de la capitale et dans les cuisines des grands restaurants sur ces avenues. (...) Mais aucun chercheur ne parvint au jour fixé à éveiller la moindre étincelle d'azur sur la reine des fleurs." (in "La rose bleue de Chimène").

Ces quelques mots ne nous invitent-ils pas à tourner d'autres pages ? A ouvrir d'autres ouvrages de ce grand écrivain masqué de notre temps ? A nous interroger, aussi, sur la technique comme double subliminal de la nature dans lequel l'homme est devenu le figurant d'un film tourné par la méga-machine. Matrix n'a rien inventé. Les contes merveilleux avaient déjà tout compris.

 

Le Nom perdu de l'Homme,

"Contes"

Les impliqués Éditeur, 2023.

19 euros.


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11 réactions à cet article    


  • Rinbeau Rinbeau 4 mai 15:18

    Si l’humanité recule face à la « technique » c’est parce-que les banques (nous sommes en ploutocratie) finance une technique qui est défavorable à l’humanité..

    Un vrai humanisme solidaire des peuples du monde entier.. C’est la mort de la ploutocratie Anglo-Saxonne !


    • Sirius Brutus 4 mai 15:47

      @Rinbeau

      je suis d’acord à un détail près :
      cette ploutocratie utilise la puissance de l’état américain et deson suzerain devenu vassal britannique parce qu’ils sont à la tête de l’arsenal militaire le plus puissant du monde
      mais la finance n’a pas de patrie
      cette ploutocratie est transnationale, et ce qui se passe sous la table n’a rien à voir avec ce que les clients du casino ont sous les yeux
      la roulette est truquée
      banques, mafias et grandes familles tirents chacun la couverture à soi, mais ils sont solidaires quand il faut protéger leur système bien huilé depuis des siècles


    • Sirius Brutus 4 mai 15:53

      @Rinbeau

      les nazis ont tué plus de communistes que de juifs
      c’est la mission qui leur avait été confiée par ceux qui les ont mis en selle, qu’ils soient de la Ruhr ou du Massachusset
      et quand le sale boulot a été fait, ils ont arraché la plus grosse des têtes de la bête pour reprendre les rênes en s’assurant bien que les nouvelles têtes s’épanouissent sous leur contrôle
      en attendant, ça fait 80 ans qu’ils ont les mains libres chez eux


    • Rinbeau Rinbeau 4 mai 15:59

      @Brutus

      Je ne dis pas autre chose.. J’ai même proposé la seule hypothèse que l’on n’entend jamais sur un autre article récent

      https://www.agoravox.fr/auteur/rinbeau?debut_bestof=5#pagination_bestof

      https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/l-occident-brise-le-tabou-sur-l-254465#forum6725728


    • Rinbeau Rinbeau 4 mai 17:04

      @Rinbeau

      Il est une possibilité non envisagée encore (tant elle pourrait paraitre inimaginable) .. Mais qui doit se voir posée quand même tant elle a le mérite de répondre à certaines interrogations sur les évènements mondiaux actuels.. Pour cela il faut reprendre la célèbre citation d’Anatole France..

      Au début de la Première Guerre mondiale, France écrit des textes guerriers et patriotes, qu’il regrettera par la suite20. Il y dénonce la folie guerrière voulue par le système capitaliste dans le contexte de l’Union sacrée en déclarant : « on croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels »

      Imaginons que la Ploutocratie Anglo-Saxonne ait gagné la partie.. Qu’elle domine par sa corruption systémique tous les dirigeants importants des Etats mondiaux.. Alors tout ce que nous observons est le développement d’un plan de devant de scène (comme le COVID) visant à éliminer le plus de gueux possible tout en se faisant un maximum de « pognon ». Dans ce scénario, il faut que la guerre soit longue, bien conventionnelle et surtout non nucléaire.. Cette mise en scène nécessite bien entendu la complicité des élites Russes et Chinoises.. On aurait une entrée en guerre progressive des pays Européens (c’est pas gagné tant les peuples sont réfractaires.. mais devant la menace d’être fusillé si on déserte.. C’est déjà arrivé chez nous), ça peut se jouer.. Ils ont bien observé l’obéissance servile des populations face à la menace COVID. Les Anglo-Saxons hébergeant cette Ploutocratie organisatrice resterait en retrait.. Comme d’habitude en fait.. A moins qu’un imprévu comme il en arrive souvent dans ces cas là les pousse eux aussi à condamner une partie de leurs gueux..

      J’ai entendu je crois toutes les hypothèses concernant ce qu’il se passe.. Sauf celle-ci qui a au moins maintenant le mérite d’avoir été abordé.. 


    • Sirius Brutus 4 mai 17:10

      @Rinbeau

      ça n’a rien d’inimaginable, sauf qu’ils ne veulent pas éliminer les gueux dont ils ont besoin comme les abeilles et les fourmis ont besoin des ouvrières
      ils veulent simplement les réduire à l’état de zombies consommateurs contribuables en les conditionnant par la peur et en leur redistribuant juste ce qu’il faut pour que le système de la macine à laver l’’argent sale récolté partout continue à fonctionner
      même eux ont besoin de se sentir entourés d’êtrs humains, ils ont des hormones comme tout le monde et il faut vidanger de temps en temps


    • JACQUOU JACQUOU 4 mai 18:04

      @Brutus

      ça n’a rien d’inimaginable

      Si pour la plupart des gens.. Leur culture orientée dès l’école ne les prépare pas à pouvoir entendre ce genre de choses.

      En ce qui concerne les élites.. Après le Darwinisme, le Néodarwinisme a fait naitre une idéologie du fantasme chez nombre d’entre eux qui ont sincèrement peur d’une altération de leur génétique (qu’ils pensent supérieure) si le croisement avec des gueux devient trop important. D’autres considèrent les masses comme un danger permanent qui pourraient les submerger à tout moment et anéantir leurs privilèges de classe.. Or gérer les gueux leurs coutent à tous niveaux. Ils pensent qu’avec l’ère des robots et de l’IA, ils n’auront plus autant besoin d’esclaves et donc commencent à élaguer tranquillement.. Et par dessus tout ce qu’ils ne supportent pas.. C’est de mourir pareillement à nous.. 
      Ils nous méprisent depuis longtemps mais leur façon décomplexée de le faire ces derniers temps les rend encore plus dangereux.


    • Sirius Brutus 5 mai 07:58

      @JACQUOU

      Cette analyse est pertinente et d’autant plus effrayante qu’elle est illustrée dans la réalité par tout ce qui tourne autour du « transhumanisme ».

      Mais cela ne s’appuie pas sure les théories de Darwin qui expliquent l’évolution des espèces par la sélection naturelle.

      Or, dans le cas présent, il s’agit d’eugénisme, c’est-à-dire le projet de sélectionner méthodiquement (et non pas par adaptation au milieu) le patrimoine génétique des générations futures d’une population dans un but prédéfini.

      Mais ce n’est pas seulement une théorie et le danger tient dans le fait que des mises en pratique ont existé à grande échelle à travers des campagnes de stérilisation contrainte là où la culture dominante le permettait, comme l’encadrement juridique du mariage (interdit entre groupes « inégaux ») et des mesures de restriction ou de promotion de tel ou tel type d’immigration aux États-Unis au début du vingtième siècle (création de la « Race Betterment Foundation » en 1906), ou comme en Allemagne où le régime nazi a promulgué une loi visant à éradiquer les maladies héréditaires par l’euthanasie d’enfants handicapés et toutes les horreurs que l’on sait pour ne pas contaminer une « race pure ».

      Mais la bête n’est pas mortes, et certaines chapelles sont toujours convaincues de leur supériorité, ce qui permet à leurs yeux de traiter des populations entières comme des animaux. Il ne s’agit plus de sélectionner, mais d’« épurer ».


    • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 5 mai 10:30

      ’’le mirage de la « High Tech », condamne le "parasitisme techno-administratif" et annonce même l’avènement d’une espèce nouvelle, l’« Homo numericus ».’’

        >

      cf. code barre


      • zygzornifle zygzornifle 6 mai 10:25

        L’homme est une erreur de la création ....


        • Sylfaën.H. Sylfaën.H. 6 mai 18:09

          @zygzornifle
          Pour pouvoir s’adapter, ne faudrait il pas ressentir La tentation ? Nous avons déjà comme tous animaux l’empathie. Nous sommes dévoyés par nos relations. L’Homme, créatures, objets, Est naturellement BON.
          il y a des objets, il y a des relations.
          .
          Le bug = FRIK, usage ou échange, objet ou relation ?

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