Retraite et pension de réversion : pour un plafonnement de la pension de réversion identique pour tous les citoyens
Nous proposons de plafonner le montant de la réversion de telle sorte que son montant ajouté à celui de la pension personnelle du bénéficiaire ne dépasse pas le montant des revenus pour lesquels les Français considèrent que l'on est riche, soit 3900 Euros par mois.
Réservée aux personnes mariées ou ayant été mariées la pension de réversion consiste à accorder à l'époux survivant une pension supplémentaire dont le montant dépend du celui de la pension de retraite du conjoint décédé. En 2021 son coût s'établissait à 37 milliards d'Euros sur un budget total des retraites par répartition de 337,6 milliards d'Euros. Elle représente 11% du budget des retraites.
La réforme des retraites d'Emmanuel Macron a durci les conditions de départ en retraite en reportant l'âge de départ à 64 ans. Ce durcissement s'ajoute à l'allongement de la durée de cotisation à 43 années imposée par la réforme Touraine sous la présidence de François Hollande.
Alors que l'on demande de plus en plus d'efforts aux actifs, le maintien de ce dispositif interroge car il ne revêt aucun caractère contributif et ne présente aucun lien direct avec le travail, source principale de financement du système de retraites.
A titre d'exercice intellectuel remarquons que si l'on affecte 100% de son coût
- aux montants des retraites personnelles, cela signifie que la retraite personnelle de chaque Français est réduite de 11%,
- aux cotisations des actifs, cela signifie que les cotisations retraite sont augmentées de 11%,
- au relèvement de l'âge de départ en retraite à 64 ans, cela signifie que chaque Français est contraint de travailler 7 années de plus,
- à l'augmentation de la durée de cotisation, cela signifie que chaque Français est contraint de travailler 4,7 années de plus,
- à la dette, cela signifie qu'elle sera payée par nos enfants et petits-enfants.
Or trois remarques s'imposent :
- Par opposition au système Beveridgien des pays Anglo Saxons où la retraite est la même pour tout le monde et ne tient compte que de l'âge et de la résidence dans le pays, notre système de retraites est fortement inspiré du système Bismarckien : en écho aux principes de méritocratie Républicaine, en France la retraite est le reflet de la carrière assorti cependant d'amortisseurs sociaux en ce qui concerne la retraite de base dite retraite de la Sécurité Sociale. Les retraites complémentaires AGIRC-ARRCO calculées en points semblent ne pas en contenir.
- On ne devient pas médecin, notaire, pilote de ligne, professeur, etc.. parce que l'on épouse un médecin, un notaire, un pilote de ligne, un professeur, etc.. Les diplômes, qui conditionnent la carrière, ne peuvent par nature pas se partager. Étant le reflet de la carrière, la retraite reflète donc la force de travail de la personne mesurée à l'aune du salaire qu'elle lui permet de générer. C'est pourquoi notre système de retraite consiste à comptabiliser les droits à la retraite acquis par le travail comme des droits personnels.
- La réversion est financée par l'ensemble des cotisants, y compris par ceux qui ne pourront jamais y prétendre, puisque pour un même salaire dans une même entreprise les cotisations payées sont les mêmes, que le cotisant vive seul ou pas. Par conséquent la réversion ne répond à aucune logique contributive de la part de ceux qui pourraient y prétendre. Elle est obtenue "gratuitement".
La pension de réversion n'a donc aucun lien ni avec le travail, ni avec la maternité car il existe des droits familiaux de retraite de la personne qui en bénéficie. Elle est accordée même si le/la bénéficiaire n'a jamais eu d'enfant.
Dans le régime de base (le régime de la Sécurité Sociale) elle est attribuée sous condition de revenus. Dans le régime complémentaire AGIRC-ARCOO la condition de revenus n'existe pas mais il y a une condition de non remariage puisqu'un remariage permet de bénéficier d'une possibilité de réversion en provenance du nouveau conjoint.
Il existe donc une inégalité flagrante entre les assurés sociaux : ils ne perçoivent pas tous la même pension de réversion alors
- qu'elle est financée par l'ensemble des cotisants,
- qu'elle ne répond à aucune logique contributive supplémentaire de la part de ceux qui peuvent en bénéficier,
- et que le cas échéant elle pèse sur la dette donc sur le contribuable.
Cependant elle conserve sa justification pour les anciennes générations où les femmes ne travaillaient pas ou peu, car il n'y avait ni système de garde d'enfant ni système d'aides à domicile. N'étant pas insérées dans le monde du travail elles ne pouvaient pas acquérir de droits de propres.
De nos jours la situation a considérablement changée. Les femmes travaillent et tendent à occuper des postes élevés en entreprise, même s'il reste des progrès à faire pour les postes situés aux niveaux les plus élevés, lesquels restent cependant difficilement accessibles pour les hommes aussi.
Ce phénomène de rattrapage s'accentue pour les jeunes générations. Quoi qu'il en soit il ne devrait pas revenir à un système de retraite déjà très sollicité, de corriger a posteriori des déséquilibres injustifiés. Ces problèmes doivent être traités au moment où ils se produisent et non 40 ans après.
Répétons tout de même qu'il existe des avantages familiaux de retraite pour tenir compte de l'impact de la maternité sur la carrière.
Les travers du système
La réversion fait que mis à part la retraite de base, plus une veuve sera riche, plus l'ensemble des cotisants lui donneront de l'argent, et plus une veuve sera pauvre moins l'ensemble des cotisants lui donneront de l'argent.
De plus on peut supposer que plus le couple était riche, plus le patrimoine de la veuve sera élevé et plus la succession en provenance du conjoint décédé sera élevée, ceci sans qu'aucun prélèvement fiscal ne soit effectué, ce qui diminue la nécéssité d'une pension de réversion.
Dans ces conditions, si l'on peut admettre que la réversion continue encore pendant un certain nombre d'années à définir afin tenir compte du passé, elle deviendra très inégalitaire entre les citoyens de couches sociales différentes, et cette inégalité s'accentuera par le développement d'une homogamie professionnelle en augmentation comme conséquence de la mixité croissante du monde du travail.
La réversion risquerait alors d'apporter un supplément de revenu qui, même s'il visait à combler des différences de retraites consécutives à des différences de qualifications professionnelles qui préexistaient au mariage, objectif qui à mon sens ne serait injustifié, ne servirait en réalité qu'à augmenter une épargne qui se retrouverait in fine dans la poche des héritiers. De plus il serait logique que son attribution dépende à la fois du patrimoine du bénéficiaire et du patrimoine hérité du défunt puisque le patrimoine a une influence sur le niveau de vie.
Proposition dans une optique d'équité
Plafonner le montant de la réversion de telle sorte que son montant ajouté à celui de la pension personnelle du bénéficiaire ne dépasse pas le montant des revenus pour lesquels les Français considèrent que l'on est riche.
D'après les enquêtes d'opinion les Français considèrent qu'une personne seule est riche à partir de 3900 Euros par mois.
Nous proposons donc de plafonner la réversion à une somme qui ne permettrait pas de dépasser 3900 Euros par mois en cumulant retraite personnelle, revenus du patrimoine, et réversion.
Pour respecter le fait que la retraite est le reflet de la carrière puisque telle est la philosophie qui sous-tend notre système de retraite, la réversion ne pourrait pas être négative et venir réduire la pension personnelle de l'époux survivant.
La mise en application
Deux possibilités se présentent
- appliquer la mesure pour les génération postérieures à une date à définir afin de tenir compte du passé,
- appliquer la mesure seulement aux mariages célébrés à partir d'une date future à déterminer.
Et vous, qu'en pensez-vous ?
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